Poésie du soir.

Poésie du soir avec... "Diners de lune" de Léon-Paul Fargue.

"... La plus grande part de notre vie, et bien souvent la plus sérieuse, repose sur les bruits qui courent. Nous croyons tous à ces romans qu'on accroche à quelque cause insignifiante ou fortuite, et nous les alimentons à notre insu. Nous les prenons pour de la monnaie sonnante, car il n'y en a pas d'autre. Nul n'est censé ignorer cette loi non écrite d'après laquelle ce ne serait pas le bon sens qui est la chose du monde la mieux partagée, mais la petite imagination. Votre ami Léandre a été vu une fois dans un café passé minuit, on ne sait par qui, mais, au bout d'une semaine, c'est un pilier d'estaminet, c'est un désespéré, un personnage dostoïevskien qui passe ses jours et ses petits jours au bistrot. Vous avez oublié de régler votre teinturière, cela vous est sorti de l'esprit. Quelques jours plus tard, vous êtes un homme couvert de dettes qui ne songe pas à faire face à ses engagements !..."

Biographie :

Fils naturel d'un ingénieur issu de l'École centrale (ces deux oncles de Normale et de Polytechnique) et d'une modeste couturière, Fargue né à Paris le 4 mars 1876 et mort à Paris le 24 novembre 1947, ne fut reconnu par son père que très tardivement. Cette circonstance influa notablement sur son existence, et pourrait être à l'origine de sa mélancolie chronique et de sa sensibilité exacerbée.

Après des études secondaires brillantes au lycée Jeanson de Sailly, au cours desquelles il eut des professeurs prestigieux (Mallarmé notamment), Faguet et Parizot, Fargue entre en khâgne au lycée Henri-IV, au même moment qu'Alfred Jarry, où il reçut les cours de Bergson. Il déçoit les attentes de sa famille, qui le voulait normalien, pour choisir l'oisiveté : sensible à la peinture ou au piano, il est passionné par la poésie.
Il s'introduit rapidement dans les salons littéraires, notamment aux "mardis" de Mallarmé grâce à Régnier, où il rencontre l'élite intellectuelle et artistique du début du siècle, Valéry, Schwob, Claudel mais aussi Debussy ou Gide. Il fut membre de la Société des Apaches et se lia d'amitié avec Maurice Ravel qui mit plus tard en musique son poème Rêves (1929).

Il fonde avec Larbaud et Valéry la revue Commerce.
Après quelques poèmes publiés en 1894, Fargue donne Tancrède en 1895 (incipit : Il était plusieurs fois un jeune homme si beau que les femmes voulaient expressément qu'il écrivît), puis Poèmes en 1912 et Pour la musique en 1914.

Fargue s'exprime le plus souvent en vers libre, voire en prose, dans un langage plein de tendresse et de tristesse, sur des sujets simples, parfois cocasses (on l'a parfois comparé au photographe Robert Doisneau), plus rarement absolument onirique (voir Vulturne en 1928 cependant). Parisien amoureux de sa ville (D'après Paris, 1932 ; Le Piéton de Paris, 1939), il écrit aussi la solitude oppressante et noyée de nuit et d'alcool (Haute solitude, 1941). Fargue était également un chroniqueur étincelant de la société parisienne (Refuges, Déjeuners de soleil, 1942, ou encore La lanterne magique 1944). Il est frappé d'hémiplégie, au cours d'un repas avec Picasso, en 1943 et meurt en 1947 à Montparnasse, au domicile de sa femme, le peintre Chériane, sans avoir cessé d'écrire cependant. Il fut membre de l'Académie Mallarmé dès 1937

Photo :
- Léon-Paul Fargue, enfant.
- LP Fargue militaire.
- Léon-Paul Fargue vers 1930, photographe inconnu.
- "De la mode", par Léon-Paul Fargue, aux éditions de Paris

Diaporama

Leon paul fargue