La fin de la corrida en Catalogne…

La fin de la corrida en Catalogne…

L'interdiction de la corrida en Catalogne reflète l'époque aseptisée dans laquelle nous vivons. A choisir, entre l'abattoir et l'arène, je préfère l'arène et le combat pour la vie qui s'y déroule.

Ah, la belle victoire que voilà ! Ainsi donc la Catalogne a décidé d’interdire la corrida.

Du côté des « Antis », on se félicite. Attaquer la tauromachie sur ses propres terres et vaincre de surcroît, quelle jouissance ! Drôle d’époque. Comme j’aimerais croire que la corrida soit en effet l’ultime barbarie humaine à éradiquer, la dernière survivance d’une époque sanguinaire à jamais révolue. Comme j’aimerais penser que l’animal une fois sauvé de l’homme permettra enfin à l’homme de se sauver de lui-même. Plus de corrida, donc plus de sang versé, jamais, nulle part, ni celui des bêtes ni celui des hommes.

Du combat singulier entre le toro et le matador bientôt sans doute il ne restera plus que quelques images couleur sang et or, et des faenas de légende gravées dans les mémoires des plus anciens. Bienvenue dans un monde de volailles en batterie et de bœufs à l’abattoir. C’est propre, industriel, invisible, surtout et c’est là l’essentiel. Cachez ce sang que je ne saurais voir. Laissez-moi me fondre dans le grand troupeau de consommateurs anesthésié qui bêle le week-end dans les centres commerciaux, qui s’abrutit en semaine derrière des écrans aseptisés où le sang lorsqu’il coule, même du ventre d’un homme, n’est jamais qu’une idée de sang, lointaine, insaisissable, une idée qui, curieusement, n’atteint pas cette sensibilité que nous prétendons si raffinée aujourd’hui.

L’essentiel voyez-vous, ce n’est plus le sacré, ni l’esthétique, ni même la vérité du combat pour la vie, non l’essentiel c’est le propre, l’inodore, le sans saveur, voilà notre nouvelle morale d’occidentaux en perdition derrière nos écrans. Et nous appelons empathie ce qui n’est que sensiblerie dévoyée par nos vies stérilisées, insipides, allergiques au risque, étrangères à l’héroïsme, en panne de sacré, bercées de l’illusion funeste que la violence, à supposer qu’on refuse de la voir, disparaîtra. Ne voyez-vous pas que déjà elle se réfugie ailleurs ? Là où il n’y a ni musique, ni or, ni règles de combat, ni costumes de soie, ni bravoure, ni respect de l’adversaire ?

Qu’on me permette de ne pas me réjouir de cette sinistre victoire. Si j’étais un toro, je choisirais l’arène, je me perdrais dans les plis de la cape, je ploierais l’échine sous les coups du picador, je chasserais les banderilles de ma nuque et je chargerais, encore et encore, l’armure dressée vers le ciel, cet ennemi de soie et de lumière jouant de son intelligence pour honorer ma force, m’offrant par amour la liberté ultime de combattre.

Il y en a pour qui la vraie barbarie, c’est celle du troupeau que l’on mène à l’abattoir. Et celle-là ne fait que commencer.

 

 

LC