Quel a été le premier meurtre de l'humanité ?

 

Vous êtes-vous déjà demandés quel était le premier "vrai" crime connu dans l'histoire de l'humanité ?

En bon détective, écartons le crime mythique des enfants d'Adam et Eve - le meurtre d'Abel par son frère - pour chercher le premier vrai meurtre dont on ait gardé une trace historique. Et comme dans n'importe quelle enquête judiciaire, partons à la recherche de la victime. Car sans victime, pas de crime, vous le savez bien. Il s'agira donc évidemment de trouver des preuves scientifiques (ne rêvons pas...), ou plus raisonnablement des indices "graves et concordants", dans des récits historiques, qui nous permettent de présenter un dossier d'inculpation sérieux.

Je vous laisse une petite minute pour trouver votre propre macchabée assassiné, avant de vous proposer le mien...

Vous êtes prêts ? Spontanément, en me posant cette question, mon esprit "sherlockholmesien" s'est naturellement orienté vers une source livresque, la Bible, pour trouver la première victime de la sympathique nature humaine. Peut-être avez-vous suivi le même raisonnement.

Non pas vers le nouveau testament, mais vers l'ancien, bien sûr. Cette compilation de textes rédigés entre 500 et 150 avant Jésus Christ (sur la base de récits historiques et théologiques d'une peuplade sémite, les hébreux) pouvait apporter des preuves, disons, solides. Toutefois, les historiens s'accordant à dire que les récits de la Bible s'inspiraient au mieux d'événements survenus autour de 1800 avant J-C, cette piste n'était probablement pas la bonne. Il fallait donc chercher ailleurs les premiers meurtres dans le placard de l'Histoire. N'importe quel bon avocat de la défense aurait de toute façon détruit ces témoignages bibliques devant un jury. Des "racontars", aurait-il raillé...

Nouvelle piste inspecteurcolumbine : l'ancien empire égyptien, pendant lequel furent érigés les pyramides ou le Sphinx. Cette époque beaucoup plus ancienne - autour de 2700, 3000 avant J-C pour les premières dynasties - regorgeait d'histoire de guerres, de trahisons, d'assassinats ! J'allais être servi, les hiéroglyphes gravés dans la pierre ne risquaient pas d'être balayés devant la cour d'assise ! Sans parler de la possibilité de produire le corps, en ramenant... une momie. Mais avant même de jouer les Howard Carter, je tombais sur une nouvelle piste, beaucoup plus sérieuse, et abandonnais du même coup ma piste moyen-orientale.

Ca y est, j'en étais sûr, j'avais mis la main herculepoirotte (dont soit dit en passant, les épisodes sont à nouveau à la télévision, comme tous les ans) sur la première personne dont on puisse dire à coup sûr qu'elle s'était faite trucider par un de ses confrères de l'espèce. Selon moi, la première victime de l'humanité, c'était elle. Mais qui donc ? Ma foi...

En 1991, deux randonneurs tombaient fortuitement sur un corps sorti des glaces, dans les alpes italiennes. Le cadavre était naturellement momifié par le froid. Transporté à l'Institut Médico-légal d'Innsbruck, le gars se voyait doté d'un surnom - Otzi - et d'une place de choix dans la chambre froide. Les préhistoriens de l'Université d'Innsbruck situèrent l'individu comme un homme de sexe masculin, "homo sapiens sapiens" (bref, un gars comme vous et moi), du néolithique. Les professeurs d'archéologie s'étaient basés sur ses vêtements et ses objets, et notamment une hache. La datation au carbone 14 allait apporter une précision toute scientifique, datant définitivement le corps entre 3350 et 3100 avant J-C.

J'avais donc mis la main sur un cadavre sacrément vieux au cours de mon enquête. Mais comment parler de premier assassinat ? L'expertise médico-légale était sans appel, jugez vous-même : fracture nasale, blessures à la main droite, fracture du poignet droit, blessures thoraciques perforantes. N'essayez même pas d'argumenter qu'il s'était fait ça tout seul, en glissant, je vous rirais au nez : lors de l'autopsie, on constatait la présence... d'une pointe de flèche en silex ayant traversé son omoplate gauche ! Et à toutes fins utiles, précisons que la pointe ne correspondait pas aux pointes des flèches restées dans son propre carquois : il n'avait donc pas pu tomber à la renverse et par accident sur une de ses propres flèches. Enfin, les spécialistes de la police médico-légale confirmaient qu'un homme ne pouvait s'enfoncer lui-même une flèche dans son propre dos, avec suffisamment de force pour traverser l'omoplate. Bref, il n'y avait pas l'ombre d'un doute : Otzi s'était fait dézingué par un confrère, et qui plus est, par derrière !

Refermons le dossier de l'enquête. Et si vous pensez avoir trouvé une victime plus ancienne encore, n'hésitez pas à m'en faire part dans les commentaires. Pour finir sur Otzi, on n'en saura malheureusement pas plus sur les circonstances du meurtre. Tout juste peut-on dire que l'homme était vieux pour l'époque - autour de 46 ans - et que le premier meurtrier était sacrément lâche. Et italien, d'ailleurs ! Et de grâce, je n'ai absolument rien contre les italiens....

 

LC